Tout doux, Bijou ! - par Marianne Simond

Louisiane - 2012 -

Léger mais pas fainéant, tel un elfe libellule, Paco, portant sa petite valise verte à pleins bras, devançait tous les autres aux cheveux noir de jais. Il allait bon train, comme les lettres d'amoureux séparés que l'éloignement fait tressaillir en permanence. Un faux pas le fit trébucher sur le grès cérame des carreaux de l'allée. Il se rattrapa quelque peu mais lâcha sa valise, laquelle, dans sa chute, éprouva un déclic dont le son était celui de la verterelle s'ouvrant dans un bruit métallique. Les tulles, les dentelles, la gaze et l'organdi, le taffetas et le chambray, tous les échantillons s'échappèrent de leur contenant et moelleusement s'étalèrent au ralenti sur le sol. Paco dut s'agenouiller pour réparer l'aventure et poursuivre sa route. Mais ses mains, délicates, ne pouvaient s'empêcher d'éprouver la douceur et les minimes aspérités de chacun des tissus qu'elles foulaient et ce moment dura tellement longtemps que Paco se transforma en chat. La valise resta là, tandis que lui, emportant ses trésors jusqu'à la douce cachette qui lui conviendrait, s'éloigna au rythme des poses de coussinets siens sur les dalles en grès puis sur l'herbe du champ et finalement jusqu'au noisetier du coin du pré.